Margaux Vranken (lauréate 2018) est une artiste engagée. Cette talentueuse pianiste et compositrice de jazz veut faire bouger l’enseignement musical traditionnel en Belgique. A travers un stage de jazz pour enfants, elle a souhaité initier les plus jeunes à la musique autrement. Et c’est un véritable succès !
Pourquoi as-tu demandé une bourse à VOCATIO ?
Je partais du constat qu’en Belgique francophone, l’apprentissage du jazz était réservé principalement à des enfants qui avaient déjà une pratique instrumentale classique. J’ai l’impression qu’il n’y a pas énormément d’activités proposées aux enfants qui veulent commencer la musique en prenant un autre angle d’approche. Par exemple, jouer ensemble. Je trouve que c’est génial pour commencer la musique de trouver le plaisir de jouer ensemble !
J’avais donc envie de créer un stage ouvert à tous les enfants, qu’ils aient ou n’aient pas encore de pratique instrumentale. Je me suis dit qu’on allait faire un petit orchestre de jazz. J’avais envie de faire appel à leur créativité, à leur imagination et de faire un gros travail sur le collectif. Je voulais aussi que ce soit démocratique au niveau financier. Pour ce faire, j’avais besoin d’un gros soutien financier et de partenaires logistiques.
Comment s’est passé l’organisation du stage ?
C’était beaucoup de travail réparti sur plusieurs mois : la sélection du répertoire, la recherche des intervenants et tout le côté logistique. J’avais réfléchi à des idées créatives, comme un atelier bricolage mais aussi à toute la didactique. J’avais, par exemple, fait un petit cours très interactif de l’histoire du jazz. On a parlé du contexte historique super important de cette musique, notamment de l’esclavage. C’est très important de savoir d’où vient le jazz et quelle portée symbolique et politique elle a, parce que c’est une musique de l’engagement ; c’est pour ça aussi que ça me parle. Insuffler ça à des enfants très jeunes en fera des meilleures personnes et des meilleurs citoyens en citoyennes.
Comment s’est passé le stage ?
Super bien ! Il y avait beaucoup de motivation et d’envie de la part des enfants et des intervenants. On a fait un bon boulot en amont pour amener ça parce que ce n’est pas une musique facile. Il faut des clés de compréhension. Le but de ce stage, c’est aussi de former le public de demain pour que ces musiques continuent à vivre. J’espère que ça va se répercuter, faire un effet boule de neige.
Les enfants ont accroché dès le début ?
Oui, dès le début. Ce qui était génial, c’est que les enfants demandaient tout le temps à jouer des instruments ! Jouer de la musique, c’est un jeu donc c’est marrant.
Ce qui était génial aussi, c’était de voir que les enfants se rendaient compte de l’exigence musicale du jazz et de la pratique d’un instrument en général. Je pense que ce stage est un bon outil pour tous les domaines de la vie parce qu’il fait appel à des notions comme la détermination, l’effort, l’engagement et le dévouement. Mais le tout, de façon très positive. C’est une implication qui, je l’espère, pourra ouvrir des vocations !
Qu’est-ce que les enfants ont retiré de cette expérience ?
Certains enfants ont dit que c’était trop génial de pouvoir créer. De pouvoir écrire des paroles, par exemple. Je pense qu’ils ont retiré pas mal de satisfaction de la création pure.
Je pense qu’ils ont aussi retenu que c’est une création de groupe, et ça c’est génial ! Ça prend plus de temps, ça demande beaucoup d’encadrement et de patience mais c’est possible. Je pense que c’est très gratifiant pour eux de se dire qu’ils ont fait quelque chose tous ensemble. En tout cas, ils sont très motivés de refaire un stage et de rejouer ensemble !
Et toi, qu’est-ce que tu as retiré de cette expérience ?
J’en ai retiré que j’adore coordonner ! Tous les aspects du projet sont aussi satisfaisants pour moi que le résultat final. C’était génial de gérer une équipe et de communiquer ses idées aux enfants et aux intervenants.
J’en ai aussi retiré beaucoup de plaisir et de sens. Je pense que c’est une belle réussite et le résultat final est quelque chose de plus grand que la musique en elle-même. Jouer ensemble, c’est la transmission de valeurs. C’est faire de la place aux autres, se positionner en tant qu’individu dans la collectivité, accepter les différences et être inclusif.
Et maintenant, quelle est la suite ?
Justement, je suis en train de plancher sur le stage, édition 2. Ce serait organisé par quelqu’un d’autre mais en reprenant le même concept et en allant plus loin : d’autres morceaux, approfondir ce qu’on connaît déjà, faire un plus grand orchestre. J’ai envie que ça continue parce que c’est une demande unanime de la part des enfants.
Ensuite, c’est réfléchir au jazz dans les écoles en Belgique : en amener plus, comment, avec qui, par quels moyens. C’est un gros chantier !
Je pense aussi à l’organisation de festivals en Belgique. Aux Etats-Unis, j’ai rencontré plein de super musiciens et musiciennes et j’ai plein d’idées ! J’ai envie que les Belges soient encore plus ouverts à des musiques du monde entier !